Ces derniers jours ont été marqués par un événement musical : l’apparition de « Now and Then », une récente chanson attribuée aux Beatles. Cependant, le terme « chanson » est discutable pour ce morceau, étant essentiellement une série d’accords accompagnée de la voix langoureuse de John Lennon. Il est loin, très loin, du statut emblématique de « Yesterday ».
La découverte de cette pièce trouve son origine dans une cassette audio renfermant trois ébauches léguées par Yoko Ono, la veuve de John Lennon, aux membres survivants du groupe de Liverpool, surnommés à l’époque les « Threatles ». Parmi ces ébauches, « Free As A Bird » a été rendue exploitable, bien que Paul McCartney ait dû la compléter de manière significative. La deuxième, « Real Love », est anecdotique, et « Now and Then » encore davantage.
La chanson et son clip associé s’inscrivent dans la même lignée : des titres inédits qui auraient peut-être dû le rester. S’ils avaient réellement captivé, ils auraient certainement trouvé leur place sur des albums. Cependant, ces créations semblent bien en deçà de la qualité habituelle des Beatles, atteignant un niveau sonore que même un musicien amateur aurait pu produire.
Quant au clip, il a également été modifié grâce à une intelligence artificielle, faisant apparaître les membres décédés du groupe parmi les vivants. Cette manipulation frôle la nécromancie, une tendance qui semble se répandre, peut-être en raison du déclin de la musique pop et rock, qui semble avoir épuisé ses ressources créatives des années 60 aux années 70. Cela se manifeste par une vague de nostalgie, où des hologrammes ou des spectres attirent des foules en tournée, créant une liste interminable d’événements simulés.
Des groupes comme ABBA se produisent désormais en 3D, utilisant des technologies avancées de George Lucas, le créateur de Star Wars. Des artistes comme Mariah Carey peuvent donner des concerts simultanés dans différentes villes, et des avatars d’icônes comme Elvis Presley ou Michael Jackson se produisent après leur décès. Cette tendance touche même des légendes telles que Roy Orbison, Whitney Houston, et même Maria Callas.
En France, malgré quelques tentatives comme la tournée Hit-Parade en 2017, mettant en avant des simulations de Mike Brant, Sacha Distel, Dalida et Claude François, cette tendance peine à séduire. Même en politique, des personnalités comme Jean-Luc Mélenchon ont utilisé des hologrammes lors de meetings. Ces représentations virtuelles, bien qu’offrant des avantages pour les producteurs en termes de coûts et de comportement, soulèvent des questions sur la nature schizophrénique d’une société cherchant à la fois de nouvelles perspectives tout en se réfugiant dans le passé, allant jusqu’à ressusciter des figures du passé.
Cette fascination pour le passé cohabite étrangement avec un désir de futur, illustrant un monde occidental paradoxal, à la recherche d’innovations sociales tout en se réconfortant dans les souvenirs, allant jusqu’à ranimer des souvenirs anciens. En attendant, revisiter « Abbey Road », le chef-d’œuvre posthume des Beatles, rappelle l’époque où ces artistes étaient bel et bien vivants.